LE DÉDAIN - BRIVE: DES ACTEURS Á L'HÔPITAL
- Les carnets d'Asclépios
- 6 déc. 2021
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 27 mai 2024

On apprenait dans les journaux en fin de semaine dernière que la direction de l’hôpital de Brive avait embauché des acteurs afin de mettre à l’épreuve son personnel.
Ma première réaction a été le dégoût. Mais en y réfléchissant tout le week-end, je me dis que cette petite action exprime beaucoup plus que ce qu’elle est réellement.
Revenons en arrière de quelques décennies : la communauté européenne demande à tous ses états membres de démanteler les services publics au profit de la libre concurrence. Le problème, c’est qu’en France on les aime nos services. Les dirigeants sont donc confrontés à un hiatus. Heureusement pour eux, malheureusement pour nous, ils trouvent une astuce : la T2A. La tarification à l’acte. Ainsi, les hôpitaux publics et privés seront rémunérés sur la même base en fonction des services qu’ils offrent. Dans la pratique, c’est une catastrophe. Le public n’accueillant pas la même population que le privé, il se trouve débordé par les patients lourds, en misère médicale et sociale avec des enveloppes budgétaires qui diminuent, un personnel sous-payé et une disparition des vocations hospitalières.
Alors quel est le lien entre la rémunération de l’hôpital et les acteurs corréziens ?
J’y viens.
Suite à ce violent coup dans le ventre de l’institution, l’hôpital est à genou, alors c’est le moment de frapper : on coupe les vivres, on dépossède le personnel du pouvoir de décision en s’assurant que des faire-valoir reste à la table et on privatise : labos, ménages, cuisines, parkings, imageries, …
Toujours pas de rapport avec notre affaire ?
Encore un effort.
Pour faire fermer un hôpital ou lui imposer des choix contre son gré, il faut le discréditer. Alors on l’étouffe, on pousse à l’erreur et comme au chien que l’on souhaite faire piquer, on crie qu’il a la rage.
Et bien cette affaire est exactement le symptôme de cette politique. Nous en sommes arrivés à un stade où personne n’a plus honte de rien. L’actualité est tellement emplie d’affaires infectes que la direction de l’hôpital navigue en toute impunité et sans vergogne pour demander à des équipes épuisées de se faire mener en bateau par des faux patients.
Quelle image renvoie-t-on aux soignants à qui l’on instille l’idée qu’il n’y a plus de confiance, que l’on infiltre les rangs des malades avec des soignés factices ?
Quelles conséquences pour les professionnels ainsi dupés qui vont devoir retourner au travail avec le doute devant chaque patient ?
Comment peut-on à ce point toucher à cette profession sacrée qui impose aux soignants de donner de soi, de se présenter face à la détresse, la douleur, devant des personnes qui chaque jour s’ouvrent pour demander du soutient, comment peut on flouer ces gens et pour prouver quoi ?
Que dire des chefs de pôle et chefs de service complices de cette mascarade ? On teste des agents du soin comme on teste un commercial. On méprise toute la valeur symbolique de la relation, de l’implication humaine, du don de soi, de la réflexion médicale, du transfert, du contre transfert, autant d’objets qui n’ont aucune valeur marchande et qui n’existe donc pas aux yeux des administrations.
Tout ça pour quoi ? Il ne s’agissait même pas de mettre à nu des dysfonctionnements mais seulement de tester le personnel pour obtenir une certification fantoche.
L’hôpital est en mort cérébrale mais il existe toujours des dirigeants prêts à soulager des besoins primaires sur ce corps sans vie. Il ne reste plus qu’au prochain gouvernement à le débrancher et le travail sera terminé.
Iconographie: Pinocchio par les studios Disney
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